Mon arrière grand-père Hermann Wachsberger et ses descendants

Hermann et Augusta

Aba, né en 1857 à Klasno a épousé Augusta (Gusta) Wechsner. Il a changé son prénom en quittant le ghetto pour devenir Hermann (pour être moins facilement identifié comme juif ?). Il a quitté Klasno vers 1880 pour aller habiter d’abord à Saybush où est née Netty, puis Lipnik où il a eu les deux enfants suivant (Johanna et Bruno) puis a déménagé à Ratibor (où il a eu deux jumelles,Rosa et Saly), et s’est fixé, enfin, en 1886 à Opava  (Troppau) où il a eu au moins certaines de ses autres enfants (Samuel, Leni, Fanny, Arthur,Julius, Oskar, Léo et Alfred). J’ai un doute pour les deux derniers car lorsqu’ils sont nés, il est probable que la famille habitait à Ostrava. Il tenait là une épicerie fine (Delikatessenhandler). Il n’est pas évident d’interpréter cette migration progressive vers l’Ouest mais aussi vers les grandes villes. Il est possible que les raisons financières (recherche d’un commerce plus florissant) se mélangent à des raisons culturelles (déplacement dans des territoires où la langue allemande est plus pratiquée) et sociales (échapper aux territoires les plus antisémites).

On trouve la trace de Hermann, Augusta et leurs 8 premiers enfants dans le recensement de 1891 d’Opava. Ils habitent alors dans l’appartement 3 de la maison 300 du centre ville.

Recensement Opava, 1891

A l’époque où Hermann et Augusta s’installent à Opava (Troppau), la ville est le siège de la Silésie autrichienne, un territoire indépendant de la couronne de Bohème (elle-même partie prenante de l’empire austro-hongrois), doté de sa propre administration d’État, le Parlement de l’État de Silésie et d’un gouverneur nommé par l’empereur d’Autriche. Sa population est à 88 % germanophone. Wodzinski et Spyra[1] indiquent qu’il y avait 47 juifs à Opava en 1857 mais que la population juive augmente ensuite pour représenter entre 4 et 5 % de la population. Le site « Aus der Geschichte de jüdischen Gemeinder im deutschen Sprachraum)[ici] indique que vers la fin du XIXe siècle, la communauté juive est devenue de plus en plus la cible de propagande/attaques antisémites menées par des forces nationalistes dans la ville. Après la Première Guerre mondiale et le démantèlement de l’Empire autrichien, Troppau et la Silésie autrichienne furent incorporés à la Tchécoslovaquie nouvellement fondée[ici], jusqu’en 1938 où elle passe sous le régime nazi à la suite de l’annexion des sudètes et les accords de Munich.

Hermann était delikatessenhandler, c’est-à-dire qu’il tenait une épicerie fine.  Il semble qu’il ait commencé son commerce à Opava (Troppau) mais qu’il ait ensuite ouvert un deuxième magasin à Ostrava en Moravie, à une cinquantaine de kilomètres d’Opava, ville dans laquelle son frère Jakob et sa fille Netty étaient également installés (Je rappelle que Jakob a épousé la première fille d’Hermann).

Dans la mesure où Hermann et sa famille ont encore été recensés en 1911 à Opava, il semble difficile d’imaginer que ce deuxième établissement est en fait celui tenu par Jakob. L’adresse donnée, sur la Hauptstrasse, est d’ailleurs la même que celle qu’il indique. Cela signifie-t-il que les deux frères étaient associés ou que Hermann a financé son petit frère (et sa fille) pour son installation à Ostrava?


[1] Wodziński, M., Spyra, J., & Research Centre for the Culture and Languages of Polish Jews (Éds.). (2001). Jews in Silesia. Ksiegarnia Akad. [u.a.].

Un encart publié en avril 1895 dans l’Ostrauer Zeitung en Tchèque et Allemand annonce en effet l’installation de son commerce de « biens coloniaux, gibier, volaille, poissons, charcuterie depuis le 1er avril 1895 dans la maison de M. Sal Rechowski, située Hauptstrasse 16 à Märisch Ostrau. 

Ostrauer Zeitung, 4/4/1895

Ouverture d’entreprise
À l’honorable public de Märish-Ostrau, Přivos, Witkowitz et environs, je me permets, par la présente, de faire l’annonce respectueuse que depuis le 1er avril 1895, dans la maison de monsieur Sal. Reschovsky, Hauptstrasse n° 16, sous le n°18, la société Hermann Wachsberger a ouvert un magasin de
Biens coloniaux, gibier, volaille, poisson
et
épicerie fine
Mes connaissances approfondies en la matière, acquises au cours de mes 10 années de travail à la Troppauer Platz, me permettent de répondre à toutes les exigences de nos chers clients P. T. et je me recommande particulièrement de fournir tous les éléments nécessaires aux tables de mariage, dîners, soupers, etc.
En même temps, je voudrais profiter de l’occasion pour annoncer l’ouverture prochaine du 
Fonds de commerce Bodega
où l’on trouvera tous les vins espagnols, comme ceux vendus à Vienne, Prague, Trieste et dans les plus grandes villes d’Autriche-Hongrie, au prix d’origine. 
En demandant le soutien de mon entreprise, je signe sincèrement
Hermann Wachsberger 

On retrouve plusieurs encarts dans les journaux dans lesquels Hermann fait de la réclame pour sa boutique, comme celui de  décembre 1896, paru en tchèque dans le Ostravice. L’adresse indiquée est cette fois la rue Hlavni.

Journal Ostravice décembre 1896

Pour les vacances à venir !
Expéditions fraîches quotidiennes de brochets vivants, sandres, saumons du Rhin et norvégiens. langues et Danube vivant. Grosses carpes de toutes tailles. Chapons de Styrie engraissés à la matière grasse du lait, poulets rôtis, dindes, Canards.
Faisans rares tchèques, coqs de bruyère, bonhommes de neige, dos de chevreuil et croupes de chevreuil frais et lièvres également frais.
Malaga séché, pommes, ventres d’amandes, noix de Styrie et françaises. ainsi que des fruits frais et séchés du sud de toutes sortes. Tous les coups
Des spécialités nationales et étrangères pour les cuisines et les restaurants à des prix très bas proposées par l’épicerie fine
H. Wachsberger
à Opava et Mor Ostrava sur la rue Hlavní
Vrai poppav. Thé en emballages originaux de toutes tailles et toutes sortes.
Liqueurs fines. Cognac et rhum jamaïcain dans leurs bouteilles d’origine.
Veuillez envoyer les commandes de la campagne à temps !

Les réclames successives permettent de se faire une idée de l’importance de la boutique et de retracer ses déménagements. En décembre 1910, on trouve notamment plusieurs encarts dans l’Ostrauer Zeitung. L’adresse indiquée est désormais Schlossgasse à Moravska Ostrava.

Ostrauer Zeitung, 1910

Carpes miroir vivantes
Saumons du Rhin et argenté, calamar de rivière, sandre, poisson de mer frais au kg. 80-90 h.Soles, harengs frais pour la friture. Tous les types de poissons sont vidés. Poulets au four, chapons de Styrie, poulardes, poulets rôtis et petits poulets gras indiens. Les meilleurs jambons de Pâques de Prague. Laitue parisienne et cornichons. Les radis, les poids mange-tout en bidon de 1 litre 90h, 1/2 litre 52h, ainsi que toutes les meilleurs gourmandises pour la table de Pâques et tous les types de fromages et de poissons pour la Semaine Sainte sont disponibles frais, en grande quantité, chaque jour et sont proposés aux prix les plus bas.
Hermann Wachsberger
Mär.Ostrau, uniquement sur Schlossgasse

Ostrauer Zeitung, 1910

Pour les vacances à venir
Le sous-signé incite les clients à accorder la plus grande attention à son entrepôt réfrigéré et richement assorti de
mets de choix
Carpes miroir vivantes, toujours disponibles dans n’importe quelle taille
Poisson frais et vivant, Saumons du Rhin et saumons argenté, calamar de rivière et brochet
La meilleur volaille de table
Magnifique faisan et lièvres, Meilleurs jambons salés
Des vinaigrettes fraîches tous les jours pendant longtemps. Le tout offert à des prix très bon marché !
Hermann Wachsberger,
épicerie fine.
Des délices frais tous les jours
uniquement dans la Schlossgasse.

De fait, c’est à cette date (plus exactement en janvier 1911) que sa société est officiellement inscrite auprès du registre du commerce de la ville. Cela signifie-t-il que la famille avait alors déménagé à Ostrava ?

Il fait aussi paraître à cette occasion un encart dans le journal « Comptoir der Brünner Zeitung ». J’ignore pourquoi cet encart se fait dans un journal de Brünn.Peut-être était-ce le lieu où se trouvait le tribunal du commerce.

On note que son nom avait été mal orthographié sur la facture du journal ce qui conduit Hermann à envoyer une demande de rectification, écrite sur une carte de correspondance à son nom. « Mon nom est bien tourjours Hermann Wachsberger et non Wachsberg. »

En 1914, le Streissler’s Adressbuch für die politischen Bezirke Mähr.-Ostrau indique l’adresse de son épicerie fine à Ostrava. Juste en dessous, on trouve celle de son frère Jakob, installé au 14 de la Hauptstrasse.

Streissler’s Adressbuch für die politischen Bezirke Mähr.-Ostrau. 1914

Les divers recensements d’Opava permettent de retracer son passage, celui de 1911 dont la dernière colonne a été annotée dans les années 1930, donne des indications sur le devenir de ses enfants et sur lui-même. On apprend ainsi qu’une décision du tribunal administratif d’octobre 1903 lui accorde la citoyenneté à Troppau (littéralement: le droit de se considérer dans son pays).  

Zoom sur la feuille de recensement

En rouge, sur la ligne d’Hermann, il est indiqué qu’en octobre 1903, le tribunal administratif lui a accordé la citoyenneté à Troppau ((littéralement: le droit de se considérer dans son pays). (NB : pour voir à quoi ressemble un certificat de citoyenneté de la cille de Troppau, voir Julius, plus loin)

Son métier est Delikatessenhandler

Gattin ou Ehegattin signifie : époux ou épouse

Il a déménagé à Berlin, comme beaucoup de ses enfants, certainement après la première guerre mondiale et le démantèlement de l’empire autrichien. On trouve sa trace dans l’annuaire téléphonique de Berlin à partir de 1921 (pas d’indication de profession).

Les frontières de l’empire austro-hongrois et son démantèlement en 1923

Sa femme, Augusta, est décédée à Berlin cette même année. C’est leur fils Léo qui déclare le décès. Je n’ai pas trouvé pour l’instant de traces du lieu et de la date du décès d’Hermann (1931 ?). Il est encore indiqué dans l’annuaire  juif de Berlin de 1931-1932 mais n’est plus dans les annuaires téléphoniques  à partir de 1932.

Hermann et Augusta ont eu 13 enfants : Netty, Johanna, Bruno, Rosa, Saly, Samuel, Leni, Fanny, Arthur, Julius, Oskar, Leo, Alfred

Netty/Jeanette est née en 1880 à Saybusch (Zywiec), une petite ville de Pologne, à plus de 80 kilomètres de Wieliczka, tristement connue  aujourd’hui par la déportation vers l’Est (Action Saybusch) de ses habitants par la Wehrmacht et la police allemande dans le cadre du plan de constitution du Lebensraum  allemand, de septembre à décembre 1940.

Johanna est née en 1882, à Lipnik Biala. Elle se marie je ne sais quand ni où avec David Joachimsmann. Ils habitent à Berlin où naissent leurs deux enfants, Lilly en 1907 et Kurt en 1910. Son mari décède à Berlin le 9 juillet 1925, à 49 ans. C’est leur fille Lilly qui annonce le décès.

On trouve la trace de Johanna en 1931 dans l’annuaire juif (sous son nom de femme mariée) ainsi que dans les registres de résidence de Wilmersdorf.

En 1935 elle se remarie avec David Freund mais ce dernier décède un an plus tard, en 1936.

Légende à mettre

Elle migre au Brésil en février 1939 puis aux Etats-Unis en février 1946. Des gens ont cherché sa trace aux archives d’Arolsen, en 1969.

Lilly nait à Berlin en 1907

Son frère Kurt nait en 1910 (mais je ne trouve pas son certificat de naissance). Il migre pour les États-Unis en octobre 1936 (en passant par Cherbourg) en qualité d’employé de maison, et demande sa naturalisation américaine en décembre 1936. Sur sa fiche d’immigration, il dit vouloir rejoindre un cousin à Bronxville, H. Isler, au 5 Colonial Road.

Plus tard, son dossier de demande de naturalisation comporte une page remplie en 1942 par Alfred et Adèle Wachsberger, citoyens américains, qui se portent garant de lui (en disant le connaitre depuis le 1er janvier 1937).

Liste des passagers arrivant aux Etats-Unis 10 mars 1936 
Demande de naturalisation américaine de Kurt Joachimsmann de 1936

Le 29 septembre 1942, il s’engage à Fort Jay Governors Island (Fort Jay) dans l’armée américaine. Il est intégré dans la division : « Branch Immaterial – Warrant Officers, USA ». Il indique sur la carte d’enrolement l’adresse de son oncle Alfred Wachsberger comme personne susceptible d’être toujours en contact avec lui. A cette date, il n’est pas encore citoyen américain. J’ignore s’il le deviendra. Son lieu d’habitation indiqué est Queens, New York, son niveau d’éducation « 4 years of high school », sa profession « salespersons », sa taille 67 pouces (soit 1,70m), son poids 129 lbs (soit 58 kg)

Il se marie en 1942 avec Harriet Kruger

Il s’est installé à Berlin dès 1909 (26 ans). Il était associé avec son frère Samuel Max dans la société Wachsberger (Furnitüren en gros).

Il est mort sous le drapeau prussien le 17 mars 1915 et fut décoré après sa mort de la médaille d’argent pour acte de bravoure de première classe en « reconnaissance d’une conduite courageuse face à l’ennemi » (in Anerkennung tapferen Verhaltens vor dem Feinde). Il était alors conducteur de train (incorporé dans le régiment d’infanterie n°1, sous-unité 7K)

Wiener Zeitung 19 mai 1915 p.3

Leurs deux enfants migrent en Afrique du Sud à une date indéterminée. Je fais l’hypothèse qu’ils sont passés par la Hollande, d’où était originaire la femme de Georg, Sarah Van Win. Ils obtiennent la nationalité Sud-Africaine en 1950.

Rosa est née à Ratibor en 1885

 Elle s’est mariée avec Ignatz Aufricht et a eu deux enfants à Ostrava en 1906 et 1912.


En 1900, Ignatz Aufricht pourrait avoir possédé un magasin d’épice et farine à Teschen qu’il met en vente dans le Schlesische Zeitung. On peut aussi penser qu’il tenait, comme son père, un commerce de farine à Ostrava. On trouve en effet la trace de ce commerce, mis en location en 1883 par Ludwig dans le Neuigskeits Welt Blatt du 13 février 1883

Neuigskeits Welt Blatt du 13 février 1883
Schlesische Zeitung, 1900

Existence sécurisée
 
Une entreprise renommée en activité depuis 40 ans et située à Teschen, Stephaniestrasse
 
Magasin d’épices et de farine
 
doit être remis à un commerçant aisé à partir du 1er octobre 1900 (ou avant) dans des conditions favorables, avec des stocks de marchandises, pour d’autres entreprises. Informations auprès d’Ignatz Aufricht à Teschen.

Location commerciale

En Moravie. A partir du 1er avril de cette année, à Ostrava sur le Ringplas, dans la maison numéro 44, est loué un magasin de farine, d’épices et de Schant qui fonctionne bien depuis de nombreuses années. – Les comptes seront remis par le propriétaire.
Ludwig Aufricht à Ostrava.

En 1894, 1900, 1903, 1910, 1913, il est régulièrement en cure à Karlsbad, sacrifiant ainsi au mode de vie bourgeois de l’époque. En 1894 il est indiqué sur la liste des curistes qu’il tient un commerce de marchandises générales à Bielitz en Silésie Est.

On trouve aussi le nom de Rosa Aufricht dans la liste des curistes, sans pouvoir savoir s’il s’agit de Rosa Wachsberger ou de sa belle sœur (ou d’une autre Rosa).

« Carlsbad était une ville de lève-tôt : « Les premiers baigneurs apparaissent aux fontaines dès 4 heures du matin ; « Les concerts commencent à 6 heures du matin sous la colonnade de la source et de la fontaine du moulin et, en haute saison, 10 000 à 12 000 personnes de presque toutes les régions du monde se rassemblent aux fontaines pour boire l’eau chaude », comme il est indiqué dans une description de 1898. »

« Pour éviter de longs temps d’attente aux bassins d’eau, les buveurs forment la fameuse « file unique de Carlsbad » pour défiler devant les fontaines et les colonnades, même si la file d’attente faisait certainement partie du « voir et être vu » socialement pertinent. Quand ce fut votre tour, vous remettez la tasse que vous aviez apportée avec vous à l’une des filles bien portantes, pour la faire remplir la minute suivante. À la fin du XIXe siècle, le gobelet, encore indispensable aujourd’hui, s’est imposé comme récipient à boire courant, de préférence avec la peinture classique « motif d’oignon de Carlsbad ». L’eau chaude est aspirée dans la bouche grâce à la poignée incurvée. Il se refroidit un peu et pénètre par petites gorgées dans l’estomac, où il rencontre souvent le « Karlsbader Zwieback » ou le « Karlsbader Wafers ». Ces deux types de pâtisseries ont été créées pour neutraliser l’arôme désagréable de l’eau thermale sulfureuse-salée. »

Rosa et Ignatz ont eu une fille Herta, née en 1906 à Ostrava. Elle se marie avec Siegmund Geminder à Ostrava. On trouve leur nom sur une liste des biens spoliés. Cette liste, établie par Der Deutsche Staatsminister für Böhmen und Mähren, indique le lieu et la date de naissance, l’Etat d’origine et l’adresse des biens spoliés. Ici , Prague XII, Mikovecstrasse 3. Cette liste a été établie après janvier 1939 puisque un prénom leur a été rajouté : Sara pour elle, Israël pour lui

L’ordonnance du 17 août 1938

Elle disposait que les personnes considérées comme juives au sens des lois raciales de 1935 et qui portaient un prénom ou un nom de famille de nature à les confondre avec des citoyens allemands étaient tenues de changer de prénom jusqu’au 31 janvier 1939 au bureau d’état civil compétent. Son application fut étendue le 24 janvier 1939 aux territoires des Sudètes et à l’Autriche récemment annexés.

Ils semblent avoir réussi à migrer en Amérique du Sud. On trouve sa trace sur des fiches Brésilienne de tourisme (1963) et de la délégation spéciale des étrangers établie dans les années 1970, indiquant qu’elle réside à Sao Paolo mais qu’elle est de nationalité Chilienne. Sur cette dernière fiche, Il est également indiqué qu’elle est veuve (elle signe Herta Aufricht de Geminder). Siegmund pourrait être décédé en Floride le 15 juillet 1974.

Saly est née à Ratibor en 1885. Elle s’est mariée avec Max Karter. On trouve leur trace dans le recensement d’Opava de 1911 (dans lequel sont aussi mentionnés leurs enfants nés après 1911).

Ils ont eu six enfants à Opava. Saly et Max ont été déportés le 29 septembre 1942 d’Ostrava à Theresienstadt et de là à Treblinka le 5 octobre.

Un petit monument, quasiment invisible rappelle à Ostrava, près de la gare, les déportations. En revanche, la synagogue Pinkus de Prague a établi la liste de toutes les victimes juives de la région. On y trouve la trace des Wachsberger.

Elsie Karter arrive à migrer aux Etats-Unis à New-York. Elle est naturalisée le 30 mars 1944 et se marie le 27 novembre 1944 avec Max Maennlein en présence de son oncle, Léo Wachsberger

Elle est recensée dans le New Jersey (Monmouth Howell en 1950 avec son mari (écrit Max Manlin) et leur fils Michael agé de 5 ans et né à New-York

Ilana Karter se marie avec Erich Markus avec qui elle a une fille, Daisy, née en 1928. Ils migrent d’Hambourg à Rio de Janiero le 13 juin 1930. Bizarement, leur fille Daisy n’est pas mengtionnée sur la liste des passagers. Elle arrive cependant aussi à migrer puisqu’on retrouve sa trace au Chili où elle se marie en 1948 avec Ralph Pinto. Ilana et Erich s’établissent après guerre au Chili où ils ont un fils Alejandro, né en 1944. Un document d’entrée au Brésil indique que Erich est de nationalité chilienne.

Trude Karter apparaît sur une liste établie le 5 février 1942 par le département du rapatriement du ministère de la protection sociale du gouvernement tchécoslovaque en exil à Londres. Il s’agit de permettre la migration de Suisse vers Mexico City. Il est indiqué, en français, qu’elle est tailleuse, sans moyen pour payer son passage. Sur la même liste figure Walter Bleyer qui deviendra son mari (Je ne sais plus comment j’ai cette information mais un site privé en hébreu mentionne ce mariage)

Le gouvernement tchécoslovaque en exil à Londres

Edvard Beneš a démissionné de son poste de président le 5 octobre 1938, après les accords de Munich et l’annexion des Sudètes par l’Allemagne nazie. Il émigre en France et anime un gouvernement en exil. Le gouvernement de Beneš, constitué à Londres en juillet 1940, est reconnu en 1942 par l’ensemble des Alliés, qui dénoncent alors les accords de Munich.

Bruno Karter est né le 16 avril 1911. Il a servi dans l’armée tchèque en exil comme sous-lieutenant d’artillerie et a été démobilisé le 16 décembre 1943.

Détail d’un membre de la république tchèque ayant servi à l’étranger

L’armée tchèque en exil

À la fin des années 1930, l’armée tchèque était l’une des plus importantes d’Europe avec environ 1,5 million de soldats, mais elle n’a guère résisté à l’occupation totale de la Tchécoslovaquie par l’Allemagne nazie en mars 1939. L’armée tchèque a alors été dissoute et de nombreux soldats tchèques ont fui vers la Roumanie et la Pologne. Après l’invasion de la Pologne par l’Allemagne, certains soldats tchèques ont combattu l’Allemagne au sein de l’Armée rouge de l’Union soviétique, tandis que d’autres ont rejoint la France, la Grande-Bretagne ou le Moyen-Orient. Des unités militaires tchèques ont participé à la bataille de France. En Grande-Bretagne, un camp de soldats tchèques a été installé près de Chester, et certains Tchèques ont été mobilisés pour aider les villes touchées par les bombardements allemands. Pendant la bataille d’Angleterre, 87 pilotes tchèques ont effectué des missions pour protéger les îles britanniques de l’invasion, dont Josef Frantisek, l’un des meilleurs as du théâtre européen.
Isaksen, Kai. « Czechoslovak Exile Units of WWII. »Military History Online. Accessed March 22, 2023

Je ne sais rien pour l’instant de Hansi Karter

Erich Karter est né le 13 juillet 1915 à Opava

Erich Karter en 1939

Le 24 janvier 1939, à l’âge de 24 ans,, il se trouve à Prague où il fait, en tchèque, une demande de passeport pour se rendre dans tous pays à des fins d’étude, en indiquant sa situation militaires (à vérifier). Cette date précède d’un mois l’annexion du territoire de Bohême et de Moravie par le troisième Reich et la constitution du protectorat de Bohême-Moravie. Cette demande est acceptée par les autorités militaires d’Opava qui, après vérification de sa situation militaire, n’émettent pas d’objection à la délivrance d’un passeport.

Demande de délivrance d’un passeport 12 janvier 1939
Réponse des autorités militaires au dos de la demande

Le 19 avril 1939, il dépose sa demande de passeport accompagnée d’une lettre. Sur l’imprimé, en tchèque, sont mentionnés le nom de ses parents, Max et Sali Wachsbergerovà

Le 25 janvier 1940, il obtient un document de police, cette fois bilingue mais rempli en allemand par les autorités qui atteste qu’il n’a commis aucun délit. Le document précise qu’il souhaite se rendre à Shangaï. On note que, suite à l’ordonnance du 17 août 1938, les hommes ont dû rajouter Israël à leur prénom et les femmes Sara : Erich devient donc Erich Israël, sont père devient Max Israël, sa mère, Saly Sara. Le document indique que Erich est étudiant en électronique, que Max est aubergiste et que Saly est femme au foyer.

Il n’arrivera cependant pas à s’échapper. Il sera déporté de Prague vers Theresienstadt le 30 novembre 1941 puis le 13 juin 1942 vers une destination inconnue, à l’Est. Au dos de sa fiche de déportation est indiqué, à la main, qu’un contact a été établi, le 13 octobre 1964, avec son beau frère Walter Bleyer (mari de Gertrud) à Zürick.

Samuel est né le 25 septembre 1886 à Opava.

On trouve sa trace à Berlin dans les différents annuaires, la première fois en 1909, associé à son frère Bruno en 1909 (voir plus haut). Il a alors 23 ans.

En 1919 la société est indiquée comme Reklame-zugabeart puis Hutfurnitüren en 1924.

Il se marie avec Paula Bach en 1913 à Berlin. Son certificat de mariage est particuilièrement intéressant car il fait apparaître les premiers prénoms de ses parents : Aba et Hermann pour son père, Sarah Gitel et non Augusta pour sa mère.

Berlin Wilmersdorf, le 29 novembre 1913

 Se sont présentés ce jour à l’officier d’état-civil soussigné en vue d’être unis par les liens du mariage
   1°-le commerçant Samuel Wachsberger, présentant comme légitimation de son identité un certificat de son pays d’origine, de religion mosaïque, né le 25 septembre 1886 à Troppau (Autriche),
demeurant à Berlin-Friedrichsfelde 14 rue de Bâle (?)
            fils du commerçant Aba Wachsberger et de l’épouse de ce dernier, Sarah Gitel, née Wechsner, domiciliés en Moravie-Ostrova

   2°- Paula (?) Bach, sans profession, présentant comme légitimation de son identité son acte de naissance, de religion mosaïque, née le 21 octobre 1888 à(?) Marienwerder,
           demeurant à Berlin-Wilmersdorf, 35 rue de Westphalie,
           fille du défunt commerçant Julius Bach, dernier domicile à Charlottenburg et de l’épouse de ce dernier Rébecca née Loewenthal, domiciliée à Berlin Wilmersdorf

La société Wachsberger Gebrüder est encore recensée en 1938 à Berlin.

Samuel et Paul ont eu un fils, mort à la naissance le 3 octobre 1914. C’est Gustav, l’oncle de Samuel qui déclare le décès.

Ils ont eu ensuite une fille, Suzy née à Berlin, le ….

Samuel Max a réussi à émigrer en Angleterre avec sa fille Suzy mais sa femme, Paula, est restée, un temps, coincée à Berlin. Dans un dossier du Fonds de Moscou, on découvre que son frère Oskar (qui signe ici Oscar), établi en France depuis 1933, a tenté, en 1939, de lui faire obtenir un visa pour fuir le nazisme par la France. Il indique dans sa lettre qu’il y a urgence à lui faire obtenir ce visa «  »afin de ne pas conduire ma pauvre parente à une misère certaine« . Pour appuyer sa demande, il joint le télégramme laconique qu’il a tout juste reçu d’elle.

« Envoie moi immédiatement le permis du ministère. Paula« 

Elle réussit pourtant, je ne sais comment ni quand, à rejoindre sa famille en Angleterre. Elle décède à Leeds en 1959. On trouve la trace de Paula dans les cartes établies par l’American Joint Distribution Committee (AJDC) en septembre 1945 à partir des listes de transport de la Gestapo et de dossiers nazis (Vermögensverwertungsstelle) pour recenser les juifs déportés de Berlin. Cette carte porte une mention bizarre puisqu’elle indique que Paula se serait suicidé ou aurait eu une vide illégale (cachée ?).

Fred, le fils de Julius, se souvient de Samuel et Paula. Voici son témoignage :


Samuel was known as Max Wachsberger, and Muckie by my family. I remember his wife Paula (and her sister Lisa Bendel) who had been living the Belgium before being reunited. For a while Muckie lived in Newcastle and worked with my father, but that did not work well, and Muckie and his family went to live in Leeds with daughter Susan. She changed her surname from Wachsberger to Walton, and then she married someone called Turp, but had no children and both died many years ago
Fred Wachsberger

Leni est née à Opava en 1888. Elle se marie à Ostrava le 27 mars 1910 (elle avait 22 ans) avec Alfred Klebinder. Ils ont eu, dans cette ville, deux enfants :Ilse et Karel.

Alfred était électrotechnicien et tenait un établissement de réparation électrique, installé dans un premier temps au numéro 3 de la Schlossgasse, c’est-à-dire à la même adresse que son beau-père Hermann (voir plus haut) puis au numéro 18 de la Neugasse.

Ostrauer Zeitung,  24 mars 1911

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Ostrauer Zeitung, 4 octobre 1911

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Établissement d’électrotechnique, Mähr.-Ostran, Neugasse 18, en face du Café Austria.

Je ne sais pas ce que devient cette boutique pendant la première guerre mondiale, ni ce que fait Alfred (Oskar et Bruno, du même âge que lui, ont servi dans l’armée prussienne). Après la première guerre mondiale, et alors que l’indépendance de la Tchécoslovaquie venait juste d’être déclarée, il ouvre (de nouveau) un magasin d’élecricité, cette fois en association avec un Tchèque. Contrairement donc avec la plupart des Wachsberger, il fait le choix de rester en Bohême-Moravie plutôt que de migrer à Berlin.

Ostrauer Zeitung, 1er décembre 1918

Ouverture d’entreprise !

Nous nous permettons d’informer le public de Märish-Ostrau et des environs que nous avons ouvert à Mähr.-Ostrau, Reichsstraße 8 (en face de l’hôtel National).
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 Alfred Klebinder et Engelbert Dudek

Alfred s’était semble-t-il établi à Prague dès 1940. On trouve en effet dans les archives de la police tchèque, un demande de renseignement adressée par les services de Prague à la police d’Ostrava sur l’adresse d’Alfred Klebinder, informations confirmées le 12 avril 1940 par cette dernière au dos du document.

Suite à ce contrôle, Alfred a obtenu en juin 1940 un certificat d’émigration vers Prague témoignant qu’il n’avait commis aucun délit

Je ne trouve aucune trace de lui jusqu’en avril 1943 où il est condamné, à Prague, à payer 500 couronnes pour n’avoir pas cédé sa place dans un bus à un Aryen.

« Le 17/03/1943, à la demande de Karl Wingartz, né le 27/02/1907, domicilié à Prague, au 75 Sudetengasse, d’appartenance au peuple allemand, a été présenté par le policier au matricule 2609 de la compagnie d’honneur le Juif Klebinder Alfred, né le 13/08/1881 à Ostrau en Moravie, dont la compétence s’étend à Ostrau en Moravie, domicilié à Prague, 9 Herrenhuterstrasse, identité citoyenne G Z 390338/a, établie par la direction de la police de Prague le 9/11/1940.

Le jour indiqué ci-dessus, le Juif Alfred Klebinder voyageait dans le wagon de queue du tramway de la ligne 19 et s’était assis bien que les autres personnes âgées dussent rester debout. Le Juif Alfred Klebinder a été rendu attentif par Karl Wingartz au fait qu’il devait se lever. Avant cela Karl Wingartz a remarqué que le ci-devant Juif avait caché l’étoile avec son porte-documents.
Au cours de l’audition Alfred Klebinder a déclaré qu’il restait des places dans le wagon du tramway et que l’étoile n’était pas cachée par son porte-documents. »
 
Page 2. (premier encart à droite) :  A la 4ème inspection criminelle. Transmis pour poursuivre la procédure. 3ème commissariat le 18/3/43. (Deuxième encart à droite) :   Au 3ème commissariat. Le Juif KLEBINDER doit être déféré et puni d’une amende de 500 K. 23/3/43. 4ème inspection criminelle. (1er encart à gauche) : Au 11ème commissariat. Prière d’enregistrer le Juif Alfred Klebinder dans le fichier pénal et en outre de lui imposer l’amende de 500 K, ou 5 jours-amende, devant être payée. 3ème commissariat, le 26/3/43. (Deuxième encart à gauche) : Au 3ème commissariat. Transmis en retour après avis conforme. 11ème commissariat, le 18/5/1943. (Troisième encart à gauche) : A la 4ème inspection criminelle. Pour information après le versement de l’amende. Prise en compte effectuée. A Verser au dossier. 10/6/49

Trois mois plus tard, il sera déporté le 5 juillet 1943, comme son fils Karel vers Theresienstadt puis le 15 mai 1944 vers Auschwitz.

Un témoignage d’une rescapée permet de resituer la déportation des juifs de Prague vers Theresienstadt le 5 juillet 1942. Les juifs de ce convoi avaient reçu une convocation (rose) à se présenter avec leurs bagages dans un centre de rassemblement de Prague, où on leur attribuait un numéro qu’ils devaient mettre en évidence devant eux. Ils y restèrent deux ou trois jours. avant d’être déportés en train (normal) vers la gare la plus proche de Theresienstadt, et d’être entassés dans le ghetto.

Leni a tenté sans succès d’émigrer en France en déposant une demande de visa au consulat de France de Prague en 1939. Elle précise que son frère Oscar, établi à Courbevoie, lui versera une mensualité de 1500 francs. Le fonctionnaire n’exprime pas un avis négatif mais indique néanmoins que « son  retour n’est pas assuré ».

« L’intéressée, d’origine israélite, sollicite un visa d’une durée de 1 an. Cherche de toute évidence à émigrer en France. Son fère, M. Oskar Wachsberger,  la soutiendra financièrement en lui versant une mensualité de 1 500 Frs. Son retour n’est pas assuré »

Son (ex)-mari ne dépose pas de demande. Le document de la police de Prague de 1943 présenté ci-dessus indique qu’Alfred est divorcé, ceci pouvant expliquer cela.

Cette demande n’aboutira pas. Leni a été déportée d’Ostrava vers Theresienstadt le 22 septembre 1942 puis vers Auschwitz le 26 janvier 1943. La liste des membres déportés le 26 janvier 1943 indique que sa fille, Ilse, se touve avec elle. Ainsi, chacun des deux parents est déporté avec un de ses enfants. Ni Leni, ni Ilse ne reviendront d’Auschwitz.

Leni et Alfred ont eu deux enfants, Ilse née le 27 avril 1911 et Karel, né le 18 juillet 1917

Karel a été déporté de Prague à Theresienstadt avec son père par le convoi du 5 juillet 1943, à l’âge de 25 ans. Il a survécu, je ne sais pas encore comment, à la mort. Sur sa carte de transport, un tampon a été rajouté : PŘEŽIL, Podle Knihy, ˵TEREZIN˶ . IL A SURVECU. d’apèrs le livre « TEREZIN« . Il a émigré aux Etats-Unis. Isle a été déportée de Theresienstadtvers Auschwitz le 26 janvier 1943/ Aucune de deux n’est revenue.

En 1957, Karel effectuera, de Caracas, des démarches auprès d’Arolsen, pour obtenir, vainement, un certificat de détention en vue de déposer une demande d’indemnisation. Il lui sera répondu qu’ 

« Il n’y a aucune preuve de décès. Nous ne sommes donc pas en mesure de faire établir un acte de décès ».

En 1972,  un document du service de recherche de la Croix Rouge, précise

« Une communication de la Croix-Rouge tchécoslovaque de Prague du 25 mai 1951 montre que le transport « CS » doit être considéré comme un transport de la mort, puisque moins de 10 % des déportés sont revenus après la guerre. Il n’y a aucune preuve de décès. Nous ne sommes donc pas en mesure de  faire en sorte que les documents consultés délivrent un acte de décès ».

Fanny

Fanny est née à Opava en 1889

Elle ne s’est pas mariée. En 1931, on trouve sa trace dans l’annuaire juif de Berlin, enregistrée à la même adresse qu’Oskar : Bayerische Strasse 24.

Elle migre en France je ne sais quelle année, pour suivre de toute évidence son frère Oskar, et habitait rue Jean Bart, à Courbevoie (elle n’y est pas recensée en 1936) mais avait semble-t-il un atelier de couture rue Cardinet à Paris.

Paris soir le 25 janvier 1940
Paris soir le 5 février 1940

Arrêtée lors de la rafle du Vel d’Hiv du 16 et 17 juillet 1942, elle a été déportée de Drancy vers Auschwitz le 29 juillet 1942 avec sa belle- sœur Fanny et sa nièce Lily Hahnova.

Fiche du camp de Drancy
Fiche familiale de la préfecture de police. Ce sont ces fiches qui ont facilité les rafles des juifs, notamment celle du Vel d’Hiv.

Arthur

Arthur est né à Opava en 1891

Il a fait des études d’architecture à Vienne .

Il a fait la 1ère guerre mondiale dans le premier régiment de l’armée impériale prussienne et a été décoré en 1915 de la médaille d’or de la bravoure en « reconnaissance de sa bravoure exceptionnelle devant l’ennemi » (in annertennung hervorragend tapferen berhaltens vor dem feinbe (Fremden Blatt, 27 mai 1915). Plusieurs journaux mentionnent ce fait de guère, dont un article de journal Märisch-Schlesiche Press du 9 juin 1917.

Fremden Blatt, 27 mai 1915, p.27
Fremden Blatt, 27 mai 1915, p.27
Märisch-Schlesiche Press du 9 juin 1917

Märisch-Schlesiche Press du 9 juin 1917

Les soldats du 1er régiment durant la 1ère guerre mondiale

Que nos braves frères, pères et membres de nos familles originaires de Silésie aient fait de leur mieux au front durant la guerre mondiale, tout le monde le sait parfaitement. Nous les connaissons trop bien. Mais il n’y a que très peu de personnes qui peuvent se faire une réelle idée de ce qui s’est fait là-bas, des actes héroïques quotidiens et même à chaque heure, du don de soi, du travail incessant, des efforts, des privations et des souffrances de toute sorte.

Qui donc sait ce qu’est une mitraille permanente, une attaque, une contre-offensive s’il ne l’a pas lui-même vécu ? Qui peut s’imaginer le travail exténuant et invisible qu’on faisait dans les tranchées alors qu’on était exposé des semaines et des mois durant à la mort ? Qui donc bien tranquillement de chez soi pourrait juger ce que signifie de vivre 10 voire 12 semaines dehors par tous les temps et de se battre tous les jours sans dormir la nuit ? De passer des jours sans manger et beaucoup d’autres choses encore.
 
Chez nous en Silésie on en entend beaucoup moins parler qu’ailleurs. Cela tient au fait que le Silésien n’aime pas trop se livrer par des récits et cela explique que dans plusieurs endroits on pense de façon générale que les Silésiens en ont moins fait que les autres puisqu’on lit si peu de hauts faits de leur part.
Plutôt que de rédiger une longue litanie glorieuse, citons quelques chiffres sur notre régiment impérial qui donnent une petite idée de la somme extraordinaire d’actes héroïques et de hauts faits que ce régiment a accomplis durant les 34 mois de guerre.
Les hommes du 1er régiment ont obtenu depuis le début de la guerre 27 médailles d’or de bravoure, 279 d’argent de 1ère classe, 1253 d’argent de 2ème classe, 47 médailles d’argent de 2ème classe avec barrette, 2980 médailles de bronze, 112 de bronze avec barrette et une de bronze avec deux barrettes, 47 médailles d’argent avec couronne et 12 sans couronne.  43 médailles de fer du mérite avec couronne et 265 sans couronne ont été décernées aux braves soldats pour leurs actes de grande bravoure.

Ont reçu la médaille d’or de la bravoure : le lieutenant d’active Eduard Schwarzer, l’adjudant Grunke, le caporal portant le titre de Korporal Eduard Lux, le lieutenant d’active Heinrich Ockermüller, l’adjudant d’état-major Josef Onderka, l’adjudant d’état-major Johann Geier, l’aspirant-cadet Dr Arthur Wachsberger, …

Malheureusement beaucoup d’entre eux sont morts ou invalides.
Ont été attribués : 3 ordres de Léopold, 10 ordres de la couronne de 3ème classe, 3 ordres de François Joseph, 69 croix du mérite militaire de 3ème classe, 1 croix du mérite pour aumônier militaire, 29 citations d’argent et 127 de bronze, presque toutes ces récompenses assorties de décoration de guerre et d’épées, de plus 2 croix du mérite en or avec couronne et 7 sans couronne ornent la poitrine des officiers du régiment impérial.
Où donc y a-t-il un autre corps de troupe qui puisse s’enorgueillir de tant de gloire ?
Et en outre il faudrait mentionner tant de héros morts et autant de soldats malheureusement faits prisonniers qui auraient mérité la gloire.

Il s’est installé à Cologne dans les années 20 où il s’est marié avec Anna Lehmann, fille d’un commerçant en tissu de Cologne. Il travaille avec son beau-père tout en étant architecte .On trouve dans les archives du fonds de Moscou la trace d’un visa pour la France délivré aux 2 conjoints en septembre 1923 pour affaires commerciales. Ils ont, pour l’obtenir, donné trois références : Albert Petit & Co, rue du Mail à Paris, Feigenheimer, 21  Fbg Saint-Antoine à Paris et J. Zuber & Co à Rixheim (en Alsace).

Une page wikipédia en allemand à son nom indique qu’il a eu un certain succès comme architecte,notamment d’intérieur. Il a aussi été historien d’art au musée ethnologique de Cologne.  Il migre en Israël à Tel-Aviv en 1933 ou il monte un magasin de meubles nommé The Cultivated Home[2]. Ses propres meubles y sont vendus. Il meurt en 1943 à Haïfa.

La revue « Art et décoration » de septembre-octobre 1938 consacre un article à la décoration de la maison palestinienne et tout particulièrement à l’influence des migrations juives. Y sont mentionnés et représentés les meubles dessinés par Arthur Wachsberger


[2] Zweig, Max. 2002. Autobiographisches und verstreute Schriften dem Nachlass. Hambourg : Igel Verlag

[…] Le Juif, lui, arrive en Palestine, Européen en pays sauvage. Exilé – et il l’est toujours, mentalement, même s’il professe la foi dans une culture nouvelle, – hébraïque sur le sol ancien, il se cramponne à tout ce qui peut lui restituer l’entourage coutumier. Dans des maisons levantines, au grand hall, à la véranda profonde, les Juifs ont apporté les meubles « Renaissance allemande » qui ornaient leurs appartements de Varsovie. Quand nos architectes ont pris la construction en main, ils aspiraient, tout d’abord, à un certain style oriental, riche en coupoles et arcatures. Mais cet orientalisme n’entrait en jeu que pour la façade. A l’intérieur on se trouvait encore en Europe centrale.
L’immigration allemande, depuis 1933, commanda une nouvelle étape du développement germanique de la demeure. Dès lors, la Palestine juive est éprise de Wohnkultur -nous préférons ne pas traduire ce mot qui signifie quelque chose comme : mouvement populaire, étroitement lié avec la réforme de la vie et de l’éducation, de l’esprit sportif et de certaines tendances politiques. En France l’architecture moderne est encore affaire de bonne société ; en Europe centrale, et, partant, en Palestine, tout le monde y prend part.
Tel-Aviv, petit faubourg de Jaffa, a constitué le premier camp pour abriter les invasions successives de Juifs venus de Russie, de Pologne, d’Allemagne. Sur sa surface insuffisante, 150.000 hommes se sont installés en moins de vingt ans. Sur un lot prévu pour une habitation individuelle de dimension modeste, viennent s’élever six à dix grands appartements (4 ou 5 pièces). Les règlements ne suivent qu’insuffisamment un développement imprévu. L’exploitation du terrain est augmentée jusqu’à 40 %, cependant on maintient le type de la maison isolée, sans mitoyenneté, de trois étages. Dans des lots étroits et profonds, l’immeuble prend son extension en profondeur, ne laissant libres que des bandes étroites de « jardin » enfermées entre de longues façades de cuisines, de lavabos, et aussi, hélas ! de chambres à coucher. […]
Julius Posener, La décoration de la maison palestinienne, Art et décoration, pp.310-316
Art et décoration, septembre-octobre 1938
Art et décoration, septembre-octobre 1938

Julius

Julius est né à Opava, dont il obtient d’ailleurs la citoyenneté en 1909, mais fait ses études à Ostrava. Un certificat de fin de scolarité d’une école publique d’Ostrava de 1909 indique qu’il a fréquenté cette école de 1900 à 1909.

Permis de conduire une moto
Certificat de fin de scolarité à Ostrava

Pendant la première guerre mondiale, il est incorporé avec Oskar dans l’armée prussienne (Ici àgauche sur la photo)

Il arrive à Berlin en même temps qu’Oskar en 1923. Sa société est indiquée comme « Hut und Mützenfurnituren ». En 1925 la société s’installe au numéro 14 de Magazinstrasse. Elle est encore répertoriée en 1938 dans l’annuaire.

Julius had a manufacturing and wholesale business, JUWA in Magazinstrasse, Berlin.
Fred Wachsberger, mai 2023

Julius se marie en 1932 à Berlin avec Adelheid Kluge, qui était mannequin pour Modehaus Hammer, à Berlin. Heidi (Adeheide) est née en 1905 comme protestante luthérienne. Elle s’est convertie à la religion juive pour se marier.


Heidi was born in 1905 as a Lutheran Protestant and confirmed in the Kaiser Wilhelm Memorial Church in central Berlin. Julius was 10 years older than Heidi and being of Jewish faith was discouraged from a relationship with a non-Jew but they were certainly in love. Heidi went to Jewish faith conversion with a Rabbi and eventually they got married at a time when being Jewish in Berlin, in the 1930s was not what you really wanted to be.
Fred Wachsberger, mai 2023

Selon leur fils Fred, Julius et Heidi migrent tous les deux en juillet 1938 de Esbjerg (Danemark) en Angleterre.


Julius and Heidi made the decision to flee to England, and Julius drove 350km to Prague in Czechoslovakia to get Czech passports in the name of Wachsbergerova (a typical Czech ending to a surname there), and they used these passports to travel from Berlin to Copenhagen in Denmark. From there to Esbjerg on the west coast, sailing from there by boat to Harwich, (Parkeston Quay) in England, and onwards by train from there to London and hopeful safe asylum.
Fred Wachsberger, mai 2023

Julius et Adelhaid apparaissent cependant sur une liste de passager pour l’Angleterre du 11 février 1934 en provenance de Hambourg. Se pourrait-il qu’ils aient fait un premier voyage exploratoire à cette date ?

En arrivant en Angleterre, Julius et Heidi apprennent qu’ils ne peuvent pas rester dans la région de Londres, mais que s’ils veulent créer une entreprise et employer des gens, ils doivent se rendre dans l’une des régions à fort taux de chômage. Ils s’établissent alors à Gateshead, où Julius fonde une société « Belts and Trimmings LTD », spécialisée en boucles de casquettes pour uniformes, ceintures et garnitures pour la chapellerie et le cuir (source : Fred Wachsberger). Herbert Lobel (1978) indique dans sa thèse que cette entreprise a pu employer jusqu’à 75 personnes. Julius et Samuel Max s’associeront un temps en Angleterre avant de se séparer et de rompre leurs liens (A vérifier).

En 1941, Ils ont un fils, Fred, né à Durham.

A la fin de la guerre, Julius réussit à renouer en 1946, le contact avec son neveu Herbert, seul rescapé de la branche familiale installée en France, et l’invite à venir en Angleterre. Ce dernier a alors 14 ans (plus d’informations ici).

Herbert s’y rendra plusieurs fois par la suite. Ci-dessous, des photos prises lors d’un séjour en 1951. Herbert a 19 ans

Julius et Heidi meurent respectivement en 1959 et 1976.

Oskar est né à Opava en 1896.

Leo est né à Opava en 1898. Il grandit là mais il se pourrait qu’il ait été scolarisé, comme Julius, à Ostrava

En 1912, un article de journal, le Mährisch-schlesischer Grenzbote, mentionne en effet un concours de sténographie lors duquel un certain Leo Wachsberger, scolarisé à la Bürgerschule I, a obtenu le premier prix du groupe I « en écrivant magnifiquement 60 mots à la minute ». C’est a priori plutôt lui (il a alors 13 ans) que son cousin germain, fils de Jakob (qui a 17 ans) mais je ne peux pas en être sur.

Mährisch-schlesischer Grenzbote. 3 juillet 1912

On trouve ensuite sa trace à Berlin en 1921, à 23 ans. C’est lui qui déclare le décès de sa mère. Il habite alors Schillingstrasse 31.

En 1927 (29 ans), on trouve son adresse dans l’annuaire, comme commerçant, à la même adresse que Julius (14, Magazinstrasse).

Il disparait des annuaires de Berlin en 1930.

Leo émigre, seul, en 1937 du Havre à New-York. Il a alors 39 ans. Il est indiqué sur la liste des passagers qu’il a un frère, Max S. Waschberger (sic !) habitant au  1 Neuefriedrichstrasse à Berlin et qu’il rejoint un frère, A. Wachsberger, au 24 riverside drive, NYC.

Il s’enrolera dans l’armée américaine en avril 1939.

Il se marie avec Erna Karola Kahn à New York, le 12 mars 1941, avec qui il aura une fille, Susan, née en 1944

A la sortie de la guerre, il fait des recherches pour trouver Herbert. Ayant trouvé son nom dans un journal, Il envoie, le 6 février 1945 une lettre (Sa signature n’a qu’à peine évoluée depuis 1921 lorsqu’il signait la déclaration de décès de sa mère. Voir plus haut) à Eugène Minkowsi, neuro-psychiatre d’origine juive polonaise qui était président de l’Union-OSE, organisme qui s’occupait des enfants juifs.

A cette date, l’OSE n’avait aucune connaissance de l’existence d’Herbert qui ne figure sur aucune des listes qu’ils ont à disposition. L’OSE diligente cependant une enquête et dépose un courrier  au nom d’Herbert chez la concierge de la résidence du 1 allée du Midi (devenue rue Pierre Brossolette), laquelle habite au 100 rue de Colombes. C’est par ce biais que l’OSE finit par établir le contact avec Herbert.

Ci-dessous, le courrier de Leo, annoté par les services de l’OSE. Herbert ne figure pas sur fichier des : – listes maison OSE; – liste Sarel; – liste Suisse. Quelqu’un a aussi écrit « viendra samedi matin« , parlant certainement d’Herbert, une fois qu’ils ont reçu le mot de la concierge ?

Courrier de Leo Wachsberger à l’OSE
Mot remis à l’OSE donnant des nouvelles d’Herbert. Ecrit par la concierge ?
Copie du télégramme envoyé à Leo par l’OSE

En 1950, quelques mois avant sa mort, on trouve la trace de Leo dans le recensement de New-York, 614 5th Ave, où il habite avec sa femme Erna, sa belle mère Toni Kahn (sans profession), sa fille Suzan. Il est indiqué comme étant grossiste en boutons (Sale manager ; Button Wholesaler). Erna est comptable (book keeper).

Il décède à New-York, le 23 juillet 1950 à l’âge de 52 ans

Erna, elle, décès le 26 juillet 1985. Bizarrement, le faire part de décès d’Erna est en allemand !

Alfred est le dernier fils d’Hermann et Augusta. Il nait en 1901, 21 ans après Netty. Sa mère Augusta a alors 39 ans.

Il fait des études de médecine et émigre à New-York le 20 août 1926.  Il a alors 25 ans?

Il est indiqué sur sa fiche qu’il rejoint sa tante Henriette Isler, habitant à New-York, 1103 Franklin Avenue. Ses caractéristiques d’identifications sont : couleur des yeux : BL, couleur des cheveux : BL

Il s’établit ensuite à Sacramento comme ORL et se marie avec Adèle Sinclair avec qui il n’aura pas d’enfants. A l’issue de la guerre, il aurait proposé d’adopter son neveu, Herbert, selon le témoignage d’Herbert ( ?) et celui de Ruth (Koscher) Litman, petite fille de Gustav et Amalia (par Netty) rapporté, par Kristin Steinhof, qui rapporte, elle-même, le recueil d’information réalisé par Ken Wachsberger.



Alfred was an ear-nose-throat specialist, and did some plastic surgery as well. Ruth knew him personally, and was his patient. Because of his work Alfred had money and he was a sponsor for several family-members that left for US. Alfred died too early she said, from encefalitis, survived by his widow Adele.
 
         Oscar (1896), died with wife, Fanny Cahn, from Saar-Brucken, in Auschwitz.
 
According to Ruth, they had one son, whose name she didn’t recall but who, thirty-five years later, Fiona Wachsberger revealed to be Herbert. “They fled to Paris and hid the boy with a Gentile Family in the Alps.” Ruth said. “Oscar and Fanny were deported. Dr. Alfred W., Oscar’s brother, had contact with the son after the war. He and Adele had no children. They wanted to bring the nephew, who was an orphan, to USA, but he was very attached to the foster parents. I think he refused to come and he remained in France.”
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